Albuera
16 mai 1811Retour au sommaire
La batailleBataille d’Albuera, 1811, bataille indécise entre les troupes Françaises du maréchal Soult et les troupes Hispano-Britanniques du général Beresford. Une très grande boucherie.
Le duc de Dalmatie, après avoir réuni toutes ses forces disponibles, était parti de Séville dans la nuit du 9 au 10 mai, et tirant sur sa route des troupes de toutes les garnisons, il arrivait au secours du général Philippon. La division Latour-Maubourg le joignit, le 12, près de Fuente de Cantos; le 14, il prit position à Villa-Franca et Almendralejo, et, le 15, à Santa-Martha et Villalba
La cavalerie poussa même jusque devant Albuera, où l’armée ennemie se concentrait. Quoique le maréchal Soult n’eût avec lui que 18000 soldats (dont 3000 cavaliers ) et 40 pièces de canon, il se détermina à attaquer Beresford dans l’espoir de prévenir sa jonction avec le général Blake qui arrivait de Cadix avec 9000 espagnols. Mais cette jonction avait eu lieu le même jour, le 16 mai, à trois heures du matin, ce que le duc de Dalmatie ignorait.
Le maréchal Beresford avait donc sous ses ordres deux divisions d’infanterie anglaise, fortes de 8000 soldats, 7000 portugais, 3000 espagnols commandés par Castanos, 3000 hommes de cavalerie et le corps du général Blake, en tout 31000 hommes et 32 pièces de canon. Ces troupes étaient postées derrière la petite rivière d’Albuera, au point de séparation des routes qui conduisent de Séville à Olivença et à Badajoz.
La ligne de l’armée alliée, qui appuyait sa gauche au village d’Albuera, s’étendait sur un plateau élevé et assez escarpé du côté de Santa-Martha, mais uni du côté d’Olivença et de Badajoz.
Au bas de ce plateau coule l’Albuera, ruisseau dont les bords sont escarpés et le fond assez vaseux; la position à droite et à gauche était bornée et circonscrite par deux autres ruisseaux qui assuraient ses flancs. Sur les divers points de cette ligne, l’ennemi avait disposé son artillerie; une forte batterie, placée à droite du village, battait le pont qu’il fallait traverser et la rampe qu’il fallait suivre pour gravir l’escarpement et empoter Albuera.
Les anglais tenaient la droite de la ligne de bataille; les portugais le centre et les espagnols la gauche. Le village d’Albuera était occupé par des forces considérables.
Le maréchal Soult reconnut l’impossibilité d’aborder sur tous les points une si formidable position, avec une armée si inférieure en nombre. Soult avait deux fois moins d’effectifs que les anglo-portugais (18000 français contre 31 000 alliés).
La seule chose qu’il eût à faire était de se porter ses forces sur un seul point pour l’écraser, et il choisit l’extrême droite. Il fit ce choix parce que, s’il parvenait à culbuter l’aile droite, elle se replierait vers sa gauche, en démasquant le chemin d’Olivença, le seul par lequel elle pût faire sa retraite; et les français une fois maîtres de ce chemin, l’armée alliée devait être, selon toutes les probabilités, coupée ou rejetée sur Badajoz, dont la garnison agirait efficacement . Le maréchal prit donc les dispositions suivantes :
Il ordonna au général Godinot de marcher en toute hâte sur le village d’Albuera, de s’en emparer, ou, du moins, de forcer l’ennemi, en lui donnant de vives inquiétudes sur ce point, à dégarnir sa droite pour porter de secours à sa gauche. Pendant ce temps, le 5eme corps, alors commandé par le général Girard, et que le maréchal Soult dirigeait en personne, devait tomber impétueusement sur la droite de l’ennemi et la culbuter.
Cette attaque devait être appuyée par le général Latour-Maubourg à la tête de la cavalerie française, forte de quelques cents chevaux, qui, par ses charges, compléterait la déroute des anglais, si le général Girard parvenait à les entamer.
Dans le cas contraire, cette cavalerie devait se placer entre la colonne du général Godinot et le 5eme corps pour contenir l’ennemi, si celui-ci voulait profiter de sa supériorité numérique pour chercher à envelopper la gauche des français.
Deux régiments de hussards, faisant partie de la cavalerie légère aux ordres du général Briche, se portèrent à l’extrême droite de l’armée et de l’attaque que dirigeait le général Godinot, pour garder un pont dont la possession eût permis à l’ennemi de tourner les français sur ce point.
Le général Werlé, à la tête d’une division venue d’Andalousie, fut placé en réserve, afin de soutenir, si besoin était, les colonnes destinées à l’attaque principale; enfin le général de division Ruty, commandant l’artillerie, eut ordre de réunir ses batteries pour appuyer le grand mouvement du général Girard; une seule batterie d’artillerie légère fut mise à la disposition du général Godinot.
Cette batterie engagea le combat, le 16 mai, à la pointe du jour. Elle était placée à l’extrême droite de la ligne française pour seconder les mouvements du général Briche.
Celui-ci, ayant bivouaqué la nuit, en présence des alliés, avec l’artillerie légère, attaqua dès le matin, les avants postes anglais établis en avant du ruisseau d’Albuera, et réussir à les obliger de repasser le pont. Mais deux régiments de hussards ayant reçu l’ordre de joindre la division de cavalerie du général Latour-Maubourg, le général Briche se borna, avec deux régiments de chasseurs seulement, à éclairer la droite du général Godinot et à le soutenir dans son attaque.
Les postes que l’ennemi avait en avant du ruisseau d’Albuera s’étant repliés, le général Godinot fit au contraire défiler sur le pont ses colonnes, qui se trouvaient ainsi sous le feu de l’artillerie anglaise et perdaient un temps précieux, tandis qu’il leur était facile de passer à couvert le ruisseau à droite et à gauche du pont.
Malgré ce mauvais calcul, les bataillons du général Godinot marchèrent intrépidement sur le village d’Albuera, le feu meurtrier des batteries espagnoles établies auprès de l’église sur un plateau, ne les arrêta pas; les soldats français du 16eme d’infanterie légère attaquèrent le village et s’en emparèrent, mais non sans avoir perdu beaucoup de soldats.
Aussitôt que le maréchal Soult vit la tête de colonne du général Godinot s’avancer sur Albuera et les avants-postes ennemis se replier devant les chasseurs du général Briche, il ordonna au général Girard d’opérer sur la droite de l’ennemi.
La 1ere division, placée directement sous les ordres de ce général, déployée en colonne serrée par régiment, et suivie de la 2eme division dans le même ordre, s’avança vers le point indiqué. Ces troupes marchaient avec assurance et l’arme au bras.
La 1ere brigade franchit le ruisseau sous le feu ennemi, gravit l’escarpement au-dessus duquel étaient les batteries, et se précipita sur la droite des anglais. Effrayés de ce brusque mouvement, ceux-ci abandonnèrent la première sommité voisine du ruisseau et se replièrent un peu en arrière.
Ce mouvement rétrograde, que l’ennemi n’effectuait que pour mettre sa droite à couvert en l’appuyant à son centre, parut au général Girard et au maréchal Soult une retraite définitive. Dans cette conviction, le maréchal ordonna aux deux régiments de hussards français et au 1er régiment de lanciers polonais de la Vistule, de charger cette droite des anglais et de la couper du reste de l’armée alliée.
Cette charge obtint un plein succès; tout ce qui s’opposa à l’élan des cavaliers français et polonais fut culbuté; 1000 soldats anglais furent coupés et mirent bas les armes; les français s’emparèrent de six pièces de canon dont les décharges continues ne les avaient pas arrêtés un seul instant, et tuèrent les canonniers sur leurs pièces.
Après ce brillant fait d’armes, les trois régiments allèrent se reformer un peu en arrière pour charger de nouveau en cas de besoin.
Ces premiers avantages semblaient assurer la victoire aux français ; on voyait la droite de l’ennemie se former précipitamment en bataillon carré à l’aspect de la cavalerie du général Latour-Maubourg, avait reçu l’ordre de menacer cette droite, déjà si fortement compromise par la charge dont nous venons de parler.
Pendant cette charge, la colonne du général Godinot, après s’être emparée du village d’Albuera, tiraillait vigoureusement. Mais ce n’était pas là ce que voulait le maréchal Soult; il avait ordonné que l’on fondit impétueusement sur l’ennemi à la baïonnette, pour le fixer sur sa gauche, où, s’il était possible, rejeter cette gauche en arrière et la tourner .
Au lieu de suivre ces instructions, le général Godinot se borna à échanger des coups de feu pour la possession d’Albuera, et à écraser de son artillerie la masse qu’il avait devant lui, tout en étant lui-même fortement incommodé par la batterie espagnole établie sur le plateau près de l’église .
Cette batterie portait même la mort dans les petites masses disposée autour du village et dans les escadrons du général Briche, forcés de rester paisiblement spectateurs du combat, immobiles sur la droite du général Godinot, pour empêcher l’ennemi de la tourner . La mollesse de l’attaque de ce général empêcha sa colonne d’avoir, sur les opérations de la droite ennemie, l’influence nécessaire; quand le maréchal Soult s’en aperçut, il n’était plus temps d’y porter remède.
Le général Girard, à la tête du 5eme corps, serré en masse par régiment, avait passé le ruisseau d’Albuera, et après s’être emparé d’une première position de l’ennemi, il continuait à s’avancer, bien persuadé, comme nous l’avons dit, que les manœuvres des alliés sur le centre de leur ligne étaient une retraite prononcée, et que rien n’était plus facile que de porter dans toute sa droite le désordre et la confusion. Imprudente confiance qui eut de fatals résultats.
Dès que l’ennemi eut abandonné sa première position pour en prendre une autre un peu en arrière, le général Gérard l’aborda sans se donner le temps de déployer ses colonnes d’attaque, et, par ce faux mouvement, donna un grand avantage aux anglais, qui l’attendirent de pied ferme et le reçurent avec un feu de salves de deux rangs non interrompu.
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