Correspondance de Napoléon - 47° BULLETIN DE LA GRANDE ARMÉE
COMBAT DE GOLYMIN
Pendant que le corps de Bennigsen était à Pultusk et y était battu, celui de Buxhoevden se réunissait à Golymin, à midi. La division Panin, de ce corps, qui avait été attaquée la veille par le grand-duc de Berg, une autre division qui avait été battue à Nasielsk, arrivaient or différents chemins au camp de Golymin.
Le maréchal Davout, qui poursuivait l'ennemi depuis Nasielsk, l'atteignit, le chargea, et lui enleva un bois près du camp de Golymin.
Dans le même temps, le maréchal Augereau, arrivant de Golaczyzna, prenait l'ennemi en flanc. Le général de brigade Lapisse, avec le 16e d'infanterie légère, enlevait à la baïonnette un village qui servait de point d'appui à l'ennemi. La division Heudelet se déployait et marchait à lui. A trois heures après midi, le feu était des plus chauds. Le grand-duc de Berg fit exécuter avec le plus grand succès plusieurs barges, dans lesquelles la division de dragons Klein se distingua. Cependant, la nuit arrivant trop tôt, le combat continua jusqu'à onze heures du soir. L'ennemi fit sa retraite en désordre, laissant son artillerie, ses bagages, presque tous ses sacs, et beaucoup de morts. Toutes les colonnes ennemies se retirèrent sur Ostrolenka.
Le général Fénerolz, commandant une brigade de dragons, fut tué d'un boulet. L'intrépide général Rapp, aide de camp de l'Empereur, a été blessé d'un coup de fusil à la tête de sa division de dragons. Le colonel Sémélé, du brave 24e de ligne, a été blessé. Le maréchal Augereau a eu un cheval tué sous lui.
Cependant le maréchal Soult, avec son corps d'armée, était déjà ,arrivé à Mosaki, à deux lieues de Makow; mais les horribles boues, suite des pluies et du dégel, arrêtèrent sa marche et sauvèrent l'armée russe, dont pas un seul homme n'eût échappé sans cet accident.
Les destins de l'armée de Bennigsen et de celle de Buxhoevden devaient se terminer en deçà de la petite rivière d'Orzyca; mais tous les mouvements ont été contrariés par l'effet du dégel, au point que l'artillerie a mis jusqu'à deux jours pour faire trois lieues. Toutefois l'armée russe a perdu 80 pièces de canon, tous ses caissons, plus de 1,200 voitures de bagages, et 12,000 hommes tués, blessés ou faits prisonniers. Les mouvements des colonnes françaises et russes seront un objet de vive curiosité pour les militaires, lorsqu'ils seront tracés sur la carte; on y verra à combien peu il a tenu que toute cette armée ne fût prise et anéantie en peu de jours, et cela par l'effet d'une seule faute du général russe.
Nous avons perdu 800 hommes tués, et nous avons eu 2, 000 blessés. Maître d'une grande partie de l'artillerie ennemie, de toutes les positions ennemies, ayant repoussé l'ennemi à plus de quarante lieues, l'Empereur a mis son armée en quartiers d'hiver.
Avant cette expédition, les officiers russes disaient qu'ils avaient 150,000 hommes; aujourd'hui ils prétendent n'en avoir eu que la moitié. Qui croire, des officiers russes avant la bataille, ou des officiers russes après la bataille ?